7/02/2007

De John Howe à HR Giger en Pan European / I

Quoi de mieux qu’un week-end bien rempli pour se faire croire qu’on est encore en vacances? D’autant plus si on se sent, depuis quelques mois, en vacance.

Samedi, 09h30, Lausanne. Le grondement typique d’une moto feule à mes oreilles. Il arrive. M’avait avertie: «Tu verras, la Honda Pan European 1100 n’a rien à voir avec la 600 Hornet.» Une femme avertie en vaut peut-être deux, mais je me sens minuscule face à ce monstre de mécanique et de puissance. Allons donc, je ne vais pas monter sur cette machine?! Ou si!? Allons donc, j’adore ça! Ou non?!

La première heure, je déteste. Entre Lausanne et Neuchâtel, autoroute, autoroute, autoroute, je m’accroche de toutes mes forces pour ne pas demander à descendre et continuer à pied. Morte de trouille. De toute façon, n’est-ce pas, c’est bien ce qui va se produire, je vais mourir. M’imagine glisser, emportée par le vent, écartelée aux quatre de ce même. Mon petit déjeuner ne passe pas, se tourne en boule dans l’estomac, je salive abondamment, transpire, grelotte, les tunnels sont si cru, je vais tourner de l’œil après l’estomac, pourquoi ai-je voulu venir?

La Chaux-de-Fonds. Les semelles fermement ancrées au sol, je déguste un thé de menthe comme s’il s’agissait d’ambroisie. Que la terre immobile a du bon! Etrangement, c’est à cet instant-là que je m’interroge: «On repart bientôt?» Réglée tel du papier à musique. Il m’aura fallu une heure pour (re)trouver mes marques, à l’instar de ma première fois. Une heure pour me souvenir – puisque désormais je suis entrée dans ce royaume – que j’adore ça, pour me laisser séduire par la moto et (re)tomber follement amoureuse.

La suite, pendant deux jours et sur 600 kilomètres, c’est pur plaisir. Suite ininterrompue, la moto participant pleinement du voyage. On apprend peu à peu à la connaître, on s’identifie à elle, au final on ne fait plus qu’un.

Lorsque j’étais gamine et que nous partions en vacances au bord de la mer, de longues heures de voiture à la clé, je comptais les motards que j’apercevais en sens inverse. L’image m’en est revenue dimanche, sur l’autoroute en direction de Genève, au beau milieu d’un orage et sous une pluie battante. J’avais envie d’écarter les bras et de crier à tue-tête: «I’m the queen of the world!» Je les décomptais, les observais. Souvent des Allemands, qui se déplaçaient en bande. De temps à autre groupés sous un pont, lorsque le climat virait à l’aigre. Je les regardais, bien à l’abri de l’habitacle. Et aujourd’hui je me dis que j’aurais voulu les rejoindre. Vaguement, dans mon esprit de petite fille. Visions furtives qui n’ont jamais disparu, que seul un vécu particulier à cette machine a déplacé sur la ligne de mon existence.

La moto, j’adore! J’attends la prochaine fois.

Quant à la peur qui pimente le plaisir… Bah, je n’ai rien inventé. De toute manière, c’est surtout partie de mon imagination – de mon imaginaire.