7/08/2007

Tous ces dopés: dans un stade, et tac-tac-tac-tac-tac!

Votation ce week-end à Lausanne. Sujet: pour ou contre la création d’un local d’injection (sans distribution de drogue) pour les «personnes toxico-dépendantes».

La campagne a fait rage plusieurs mois durant, rapidement polarisée entre la gauche et la droite. Les arguments ont volé, souvent plus bas que le ras des pâquerettes. La droite (et pourtant je ne pense pas que l’on puisse me taxer de gauchiste) s’est singularisée par des affichages au goût douteux – «Lausanne Dope City» pour un libéral, «Lausanne capitale de la drogue» pour l’UDC, arborant un toxicomane vêtu d’un T-shirt aux couleurs du drapeau suisse… Lors de débats publics, les initiants se sont vu traiter de «nazis» et de «criminels.»

Dans cette ambiance délétère, essayer d’expliquer que la toxicomanie est une maladie, qu’il est inutile de vouloir forcer un toxico à se soigner s’il n’a pas fait le chemin dans sa tête au préalable (solution du genre: faut tous les enfermer et ils retrouveront la voie de la vérité), que certains, quelle que soit la bonne volonté de la société à les aider, ne franchiront jamais le pas (et faut-il pour autant les laisser crever sur le côté de la route?), que puisque d’aucuns persistent, autant qu’ils le fassent dans un environnement hygiéniquement irréprochable et entourés de professionnels plutôt que dans les chiottes publiques. Essayer d’expliquer qu’il y aurait un service d’ordre et que des bénévoles seraient prêts à faire le tour du quartier pour récupérer les seringues «égarées». Essayer d’expliquer quoi que ce soit de rationnel tenait de la gageure. Autant, pour plagier un capitaine de renom, jouer du cornet à piston devant la Tour Eiffel en espérant qu’elle va danser la samba.

Alors oui, ayant longtemps vécu à Berne, j’ai eu l’occasion de constater les désagréments du local d’injection. Courir mon jogging entre taches de sang et seringues empoisonnées n’était pas des plus agréables. Alors oui j’aurais eu tendance à détourner le regard, ou au contraire à me gaver en voyeuse, chaque fois que je passais devant (i.e. tous les jours) et que je croisais ces loques humaines dépourvues de la dernière des dignités. Alors oui, ce n’était pas la panacée angéliste que les uns prétendent. Alors oui je crois à la répression, notamment en ce qui concerne les dealers. Mais je crois aussi à la prévention et à l’accompagnement.

Peine perdue. Les «arguments» émotionnels-populistes l’ont emporté. Les Lausannois ont dit non à 54%. «Pas de ça chez nous!» Ou comme l’exprimait un anonyme en commentaire sur un site internet: «Tant mieux, mais tant mieux, qu’ils aillent se doper ailleurs!»

Refiler la patate chaude à son voisin. Voilà pour la version light. La version hard, souvent non-dite officiellement mais souvent évoquée entre quatre yeux intimes (je n’invente rien, je l’ai entendue dans un bistrot à l’insu des types qui causaient): «Ces dopés, faudrait tous les rassembler dans un stade et, tac-tac-tac-tac-tac, un bon coup de mitraillette, problème réglé!»

Le rejet du projet municipal est clair et net. Le peuple, ce souverain helvétique, a décidé. Ayant pris acte, on souhaite maintenant que les opposants victorieux aient à proposer quelques solutions un peu moins radicales.

2 Comments:

Anonymous Anonyme said...

LOL, c'est le genre de commentaires habituels que l'on trouve sur le site d'un Colonel "stratège de salon": au plus on est radical, au plus on est conservateur, au plus on développe des solutions en noir et blanc et au plus on est satisfait de soi même: l'égo à eu sa nourriture quotidienne....Quant aux vraies solutions, elles sont toujours trop intelectuelles pour ces individus aux vues courtes :-))))


Biz

9:08 PM  
Blogger Myriam said...

Hey Spikey !

Plaisir de te lire! Quant à ce que tu dis d'un "colonel stratège de salon" et des radicaux extrêmes qui se contentent d'une nourriture quotidienne pour leur ego... rien à ajouter - je sais de qui tu parles et je pense, profondément, comme toi!

Plaisir aussi de savoir qu'il y a d'autres personnes, indépendamment de la tendance politique, qui réfléchissent plus avant, plus loin...

Bisouxxx,

Mafalda

10:44 PM  

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