1/09/2008

Un fossé - un pont

Certains commentaires laissés dernièrement sur mon blog m’ont ramenée de nombreuses années en arrière. Je ne saurais en situer la date avec exactitude, mais ce devait être peu après mes vingt ans.

Je fréquentais alors un groupe de personnes qui se flattaient de ne lire que de la haute littérature, de ne regarder que des films d’auteur, de n’écouter que de la musique pointue, etc. Je ne sais pas ce qu’ils en pensaient réellement, mais moi j’étais assez mal à l’aise. Non pas avec le type d’œuvres précitées, plutôt par rapport à l’extrémisme que cela sous-entendait. J’étais partagée. D’un côté je trouvais cette attitude très classe, d’un autre j’avais l’impression d’être enfermée dans un carcan qui ne me convenait pas. Dans lequel je ne me reconnaissais pas. Un grand écart qui me poussait aux comportements les plus absurdes. Je me souviens, entre autres exemples, avoir encensé un livre de Thomas Pynchon auquel sincèrement je n’avais rien compris, uniquement parce qu’il était du meilleur ton de déclamer combien cet écrivain était génial. Je me souviens avoir dévoré les bouquins de Stephen King, que je découvrais en parallèle, dans le plus absolu des secrets, comme on se livre à une activité honteusement indicible. Stephen King, ce n’était pas de la «littérature», c’était du «roman de kiosque de gare». Autant dire de la sous-merde, qu’une personne normalement constituée intellectuellement ne se devait même pas de feuilleter. J’aurais souhaité partager mon point de vue, notamment sur son approche sensible de la psychologie humaine au jour le jour, mais. L’exprimer à voix haute, cela aurait signifié être exclue du groupe. Et je n’en avais pas le courage.

Cette quasi schizophrénie s’est poursuivie quelques mois durant. Je dois à un auteur que je déteste de m’en être sortie. J’ai nommé: Jean-Jacques Rousseau. Je n’épiloguerai pas sur les raisons de ma détestation. Disons simplement que sa tendance intrinsèque à la victimisation m’a toujours insupporté. Pourquoi je le lisais? Quelle question! Ecrivain et philosophe majeur, il était simplement incontournable. J’avais commencé «Julie ou la Nouvelle Héloïse». Et je m’emmerdais. Comme je m’emmerdais! A chaque page je me forçais, encore une, allez, encore une. Il devait m’en rester une vingtaine quand tout à coup j’ai eu un déclic. Je me suis vue à distance et je me suis demandé ce que j’étais en train de faire. Je me forçais à lire un livre que je n’avais pas envie de lire, pour correspondre à un cadre extérieur que j’éprouvais telle une obligation, pour continuer à faire partie d’un «clan». Ridicule! J’ai respiré profondément, et j’ai refermé la «Nouvelle Héloïse». Je ne l’ai jamais terminé. Ça a été ma libération.

Dès lors, j’ai refusé d’entrer dans la moindre secte «culturelle». Que ce soit en matière de littérature, de cinéma, de musique, etc… que ce soit en général, au quotidien.

Quel que soit le sujet, quel que soit le domaine, quel que soit le terrain, quelles que soient les personnes: je me fiche totalement des étiquettes. La richesse humaine, la richesse de l’existence, sont partout présentes.

La différence entre, au hasard:

«A la Recherche du Temps perdu» / Proust et «Hyperion» / Dan Simmons?

«L’Oeuf du Serpent» / Bergman et «Batman begins» / Chris Nolan?

«Le Mandarin merveilleux» / Béla Bartok et «Un peu de Douleur» / Superbus?

Pas de différence.

Et cela vaut pour les gens comme pour les œuvres.

Malgré les difficultés, voire les cruautés, je reste une indéboulonnable optimiste: la vie, ce et ceux qui nous entourent, recèlent d’innombrables trésors. Pour peu que l’on demeure curieux, ouvert d’esprit.

Naïveté, grinceront les aigris.

Ineffable lucidité. Ceux qui savent sauront.

Aux autres, à bon entendeur.

2 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Je crois que c'est Stephen King et non pas Steven. Mais bon c'est pas grave, on va pas être élitiste et passer à côté de toute cette richesse humaine.

6:29 PM  
Blogger Myriam said...

Une fois n'est pas coutume, un commentaire d'"anonyme" restera en place. Il s'agit effectivement de "Stephen King" et non de "Steven King", comme je l'avais écrit par erreur. Au temps pour moi... :-)

6:52 PM  

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